Réalisé par
Jeff BeesleyÉcrit par
Richard DoolingD’après la nouvelle de
Stephen KingMusique de
James Mark StewartAvec
Wes Bentley, Christian Slater, Emmanuelle Vaugier, Greg Byrk, Aidan Devine, Al Sapienza, Karen LeBlanc, Max Keene, Eugene Clark, Vivian NgHormis quelques exceptions, les adaptations cinématographiques des ouvrages de
Stephen King s’avèrent majoritairement décevantes et de facture modeste, voire médiocre. Et le schéma se voit malheureusement répété avec
Dolan’s Cadillac. Non pas que ce DTV soit mauvais en soi (le divertissement se montre respectable) mais force est de constater, d’une part, que la nouvelle de
Stephen King présentait un immense potentiel et qu’elle pouvait aboutir à un thriller intense mais que, d’autre part,
Richard Dooling et
Jeff Beesley ont fusillé ce grand potentiel en se fourvoyant dans des clichés et des partis pris impardonnables.
En effet, contraint d’étoffer la nouvelle du recueil
Rêves & Cauchemars — qui, soit dit en passant, aurait pu, en l’état, donner un très bon moyen-métrage —,
Richard Dooling s’évertue à remplacer l’efficace simplicité du récit original par des absurdités et des lieux communs éculés, qui nuisent sincèrement à la puissance des écrits de
Stephen King.
Ainsi, alors que l’écrivain restait évasif sur la manière dont Elizabeth, la femme du héros, avait été mêlée aux affaires de Dolan,
Dooling met les deux pieds dans le plat en présentant la protagoniste comme une gourde finie, ne trouvant rien de mieux à foutre que de rester bien visible (en haut d’une colline de sable, en plein jour, sur un cheval, fallait le faire !) après que le gangster se soit mis à buter ses subordonnés. Histoire d’accentuer le drame vécu par Robinson, il faut évidemment que sa femme se fasse descendre au moment où elle apprenait qu’elle était enceinte (c’est vrai que perdre l’amour de sa vie, ça n’est pas suffisant…). Mais, plus con encore, les deux tourtereaux ont beau être menacés par des tueurs à gage et sous la protection du FBI, cette demeurée se fait exploser le caisson parce qu’elle voulait absolument aller chercher un test de grossesse au beau milieu de la nuit — oui, parce qu’elle avait vomi un peu avant et, on le sait bien, toutes les femmes enceintes sont obligées de vomir (un cliché ? Non, vraiment, vous croyez ?!).
Et le scénariste ne s’arrête pas là, puisqu’en plus de ridiculiser l’un des personnages principaux,
Dooling attribue des répliques philosophiques hors-propos à l’homme de main de Dolan, et insiste bien trop lourdement sur le côté Grand Méchant Loup de l’antagoniste pour justifier la vengeance de Robinson.
L’adaptation de
Richard Dooling s’encombre donc d’écueils affligeants, qui empêchent toute retranscription de la force de la nouvelle de
Stephen King.
Mais il y a pire encore car
Jeff Beesley et son monteur
Daryl K. Davis ont le culot de sucrer la partie la plus intéressante du récit original ! De fait, la préparation du plan machiavélique de Robinson, la souffrance physique et mentale qu’il éprouve sur le chantier de construction, la confection du piège, les inquiétudes du protagoniste, sont compulsées en quelques fondus enchaînés et en quelques plans aussi convenus que navrants. À côté de cela, l’équipe de
Dolan’s Cadillac prend tout son temps pour parler des trafics de l’antagoniste…
De même, alors qu’un montage « à la
Tarantino » aurait été une liberté d’adaptation salvatrice (voir la scène du piège sous deux angles différents aurait dynamisé le récit), monteur, réalisateur et scénariste optent pour une linéarité bien plate bien lisse et prennent des libertés là où on s’en serait volontiers passé (la voiture n’est plus ensevelie sous un amas de terre — comme dans la nouvelle — mais directement sous les dalles de la route ; la webcam de Dolan n’a plus Internet mais parvient à communiquer avec le PC de Robinson, idem pour le téléphone portable… Quand même, c’est beau la technologie !).
Persiste donc au fil du visionnage le sentiment que les responsables sont passés à côté de l’essence même de la nouvelle et de ce qui faisait sa grande force. En somme, bien que la photographie de
Gerald Packer soit de toute beauté et que le score de
James Stewart mérite toute notre attention,
Dolan’s Cadillac est une sévère déception et l’on se dit que la nouvelle de
Stephen King méritait beaucoup mieux.