La Montagne Sacrée (The Holy Mountain) – 1973 Écrit & Réalisé par
Alexandro JodorowskyMusique d’
Alexandro Jodorowsky, Ronald Frangipane & Don CherryAvec
Horacio Salinas, Alexandro Jodorowsky, Ramona Saunders, Juan Ferrara, Adriana Page, Burt Kleiner, Valerie Jodorowsky, Nicky Nichols, Richard Rutcowsky, Luis Lomeli, Ana de SadeAprès le témoignage de plusieurs demi-dieux, un gourou nous expose le pèlerinage de ses pairs partis pour devenir immortels. Autant
El Topo se dégustait telle une mise en bouche de l’univers d’
Alexandro Jodorowsky, autant
La Montagne Sacrée en constitue l’aboutissement final. Véritable OVNI cinématographique et film d’auteur inégalé, le métrage de
Jodorowsky nous entraîne dans les tourments de son auteur, à mi-chemin entre la religion chrétienne et la psychose. À l’instar d’
El Topo,
La Montagne Sacrée s’encombre d’une première partie relativement lente et confuse, suscitant autant d’émerveillement (par son caractère atypique) que de lassitude (en raison de son manque de cohérence). Soudain, le scénario prend une tournure fort inattendue. Ce qui n’était alors que le parcours d’un anonyme – une figure non dissimulée de
Jésus Christ, soit dit en passant – se transforme en une croisade mystique, permettant au réalisateur d’égratigner très largement – et avec un savoureux soupçon d’humour noir – les malaises de ce monde. Qu’il s’agisse de la guerre, des armes à feu et de destruction massive, de la colonisation, du nazisme, de la pédophilie, du capitalisme, de la société de consommation, en passant par la polygamie, le conditionnement par les media et le gouvernement ;
Jodorowsky n’épargne personne à travers cette vision loufoque mais réaliste de la condition humaine. Jusqu’à ce final absolument grandiose, témoignant de l’amour de l’auteur pour le cinéma.
Et comment ne pas évoquer
La Montagne Sacrée sans aborder la somptueuse bande-son du trio
Jodorowsky/Frangipane/Cherry ? En premier lieu expérimental, le score nous introduit peu à peu à des thèmes plus entraînants, alliant avec brio rythmiques tribales et mélodies synthétiques. Mené par un
Alexandro Jodorowsky au meilleur de sa forme (et à l’accent prononcé dans son phrasé anglais), la troupe d’acteurs ne fait que décupler l’impact du produit final. Chacun adopte un jeu tellement réaliste qu’il en devient naturel, donc marquant.
En bref, hormis quelques scènes étirées ou poussées (versant à plusieurs reprises dans la scatophilie, par exemple),
La Montagne Sacrée s’impose non seulement comme un puissant chef-d’œuvre mais également comme un film d’auteur sans pareil. Difficile de rester indifférent face à un tel métrage, que ce soit en bien ou en mal. Plus qu’une bande anti-conventionnelle,
La Montagne Sacrée est une expérience à part entière.
Note : 16.5/20