Quentin Tarantino a beau être ce qu'il est — un cinéaste pervers, narcissique, à l'ego démesuré, qui passe son temps à se regarder filmer —, il n'en demeure pas moins un génie au talent incontestable et au style hors-pair. Et ce n'est certainement pas son dernier-né,
Inglourious Basterds, qui viendrait contredire cette affirmation.
Au contraire, le scénario de son long-métrage — paru en Poche au moment de la sortie cinématographique — vient confirmer la minutie et la subtilité du travail du réalisateur de
Kill Bill. D'ailleurs, à la lecture du script, il est intéressant de voir combien
Tarantino aura peaufiné son histoire — qu'il a confectionnée pendant toute une décennie — jusqu'au dernier clap.
Ainsi, si le scénario et l'adaptation ont pour seules différences dans leurs quatre premiers chapitres des scènes coupées ou raccourcies et des modifications de mise en scène, le dénouement de l'oeuvre se trouve, lui, chamboulé. Non pas en terme de résultat (puisque chaque protagoniste subit, en définitive, le sort qui a pu être aperçu en salles) mais plutôt en terme d'organisation scénique.
- Spoiler:
Notamment, dans le scénario original, les deux Salopards se faisant passer pour des Italiens ne mitraillent pas Hitler et ses sbires alors que le cinéma brûle mais celui que l'on surnomme l'Ours Juif croise l'un des rescapés marqués par la dague d'Aldo Raine et tous deux s'entretuent à bout portant. Et le second Salopard explose (à cause de la bombe qu'il a fixée à sa cheville) alors qu'il est piétiné par la foule (nazie) apeurée à cause du feu ravageant le cinéma.
De même, Shosanna n'active pas la 4e bobine (contenant le message adressé au IIIe Reich) avant que Zoller débarque dans la salle de projection, comme on le voit dans le film, mais — de manière plus héroïque et bien moins probante — après qu'elle se soit fait tirer dessus par Zoller.
Des éléments qui pourraient paraître anodins à première vue — d'autant qu'ils s'avèrent anecdotiques au bout du compte — mais qui témoignent du perfectionnisme acharné de l'auteur. Des éléments qui expliquent également pourquoi
Inglourious Basterds, en plus d'être un chef-d'oeuvre d'une finesse rare, est
LE meilleur film de
Tarantino, bien loin devant les non moins excellents
Reservoir Dogs et
Pulp Fiction.
Je recommande donc fortement la lecture du scénario d'
Inglourious Basterds, qui se lit extrêmement vite et avec énormément de plaisir.